Note Idées lecture BnF : Construit en flash back, ce roman suit Roméo de huit à dix-neuf ans, de l'instant où il « perd » sa mère jusqu'au moment où il s'engage dans l'armée. En miroir, nous suivons aussi l'enfance de Juliette, son indissociable voisine. Entre ces protagonistes du même âge, deux forces contraires sont à la manoeuvre : le magnétisme d'une attirance qui rapproche, l'implacable d'un déterminisme social qui éloigne. D'une écriture sobre, Nozière mène avec finesse ce récit à deux voix, contrastant ses personnages en évitant l'écueil de la caricature, protégé sans doute par l'affection qu'il leur porte. Si l'égoïsme de la réussite de la brillante Juliette et la dérive extrémiste - très documentée - du fragile Roméo occupent le premier plan du motif, l'auteur décale peu à peu son objectif vers Serge, le père du jeune homme. C'est la dérive de ce père malheureux et maladroit qui vient alors occuper le centre du cadre. La noirceur du propos est tempérée par l'éclaircie finale offerte par Juliette qui, hors champ, a travaillé sur son propre égoïsme. Un roman grave sur la difficulté d'être fils, d'être père, de penser à soi sans être sourd aux autres. Sur les non-dits qui brouillent tant de choses, le mensonge du père pour dissimuler le départ de sa femme en tout premier lieu.